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La Contemporaine
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L'Auvergne


Ensuite nous poussâmes jusqu’au centre de la France, jusqu’au petit village de Vielles, parce qu’on craignait une intervention de Franco dans le sud de la France. Le fait d’être sans travail finit par le mortifier. Il alla à la préfecture du Cantal et dit au préfet : « la France a accordé la légion d’honneur à mon père, peut-être pourrait-elle offrir un poste à son fils ? » Ainsi, pour la grande satisfaction de tous, il devint soudainement géomètre au barrage de Saint Etienne Cantalès. Mais pour la première fois il n’était pas le chef, mais un subalterne.

Avec un certain Miró, catalan bien sûr, il formait une paire dissemblable, lui arpenteur, l’autre assistant. On les chargea de mesurer le niveau du lac du barrage. Tâche idéale pour permettre à mon père de se trouver dans la nature. On aurait dit Don Quichotte et Sancho Panza.(…)

Il rentrait tous les jours à bicyclette. C’était le chemin de la fraternité. Il saluait les uns, discutait avec les autres, ou c’était les voisins qui lui faisaient leurs commentaires : « Señor Rubió, c’est le printemps ? » (…)

Il fut un peu le consul espagnol du barrage, où travaillaient de nombreux compatriotes : des maçons, des toreros, des pharmaciens, des dynamiteurs. S’il montait sur la colline et agitait son béret, c’était le signal d’un danger, et tous fuyaient dans la forêt.

Il attendait l’occasion de montrer sa compétence réelle d’ingénieur. Un jour, on lui donna à calculer la chute de l’eau sur une maquette. Non seulement il donna le calcul de la chute d’eau, mais il réinventa l’hydraulique. (…) « Ils doivent me donner le Prix Nobel ». (…) C’était Don Quichotte. « Quand j’irai à Stockholm, j’exigerai que l’on joue l’hymne catalan. »

Pour aller travailler, il devait faire, à bicyclette, quatorze kilomètres à l’aller et autant au retour. Il devait traverser les étendues désertiques de Saint Paul des Landes. Des volées de corbeaux le suivaient. Il avait peur de tomber là parce qu’il n’y avait aucune maison et très peu de passage. Il avait peur d’être dévoré par les corbeaux.

A force de pédaler, il conçut le premier turbo-réacteur dont je me souvienne. Mais il devait fonctionner au gaz d’œufs pourris, avec toutes les conséquences regrettables que cela avait pour les pauvres piétons qui croisaient une telle élucubration. (…)

Travailler en vue du prix Nobel ou aller chercher du bois sec pour le feu, toute tâche devait être accomplie avec la même passion. Nous, nous ne savions pas que cet homme, ingénieur de métier, nous donnait une leçon artistique.

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